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UNION Dans une lettre ouverte aux compatriotes congolais du Kivu mise en circulation le 21 février 2001 et ecrivant au nom d'un regroupement appelé Forces Républicaines Fédéralistes (FRF), MM. G. Sebaganwa, M. Rukema, P. Sebintu et M. Ruhimbika font une proposition originale de la tenue d'une "Conférence Provinciale" sur la question de "la contestation exclusive et ciblée de la nationalité Congolaise aux Banyarwanda du Nord-Kivu et aux Banyamulenge du Sud-Kivu". Cette lettre ouverte est intéressante à plus d'un titre. La présente note est destinée a en faire ressortir les points positifs, les points négatifs et les non-dits du discours des auteurs. I. Les points positifs Le premier élément réellement positif est que cette lettre semble être la première du genre dans la quelle des faiseurs d'opinion de la communauté tutsi du Sud-Kivu se démarquent nettement du régime tutsi au pouvoir à Kigali. Ce fait est d'autant plus important qu'il est nécessaire de faire une grande différence entre le régime de Kigali et la communauté tutsi du Rwanda et des pays environnants. Le régime de Kigali ne désert pas les intérêts de tous les tutsis du Rwanda, encore moins de ceux habitant les pays voisins, particulièrement le Congo. Il n'est plus un sécrêt pour personne que le régime de Kigali désert plus les intérêts d'une poigné de gens formant une junte au vrai sens du mot. Les excès du régime de Kigali lui valent même en ce moment le rejet de ceux-là même qui avaient fait sa gloire, à savoir le public américain. Ainsi, le Boston Globe du 05/02/01 affirme-t-il que ""... une masse croissante d'accusations de la part des groupes de défense des droit de l'homme et des intellectuels [assurent] que [Kagame] est le leader dans l'exploitation et le démembrement du Congo par ses voisins, commet des abus contre des droits de l'homme et est entrain de concentrer le pouvoir et la richesse rwandaise entre les mains de son propre groupe ethnique Tutsi, au detriment des Hutus, qui comprennent 80% de la population." Le Boston Globe assure que un grand nombre d'intellectuels et, en privé, des membres du gouvernement americain ont contredit de manière virulente les affirmations de M. Kagame assurant qu'il avait envoyé son armée au Congo uniquement pour des impératifs de sécurié. Par example, David S. Newbury, un spécialiste de l'Afrique des Grand Lacs et professeur d'histore à l'Universite de Caroline du Nord, avance qu'il y a un groupe de rwandais s'enrichissant dans le traffic de bois, de diamants et d'autres ressources. "Les autres problèmes du Congo ne peuvent pas être abordés quand le tiers du pays est occupé ... par le Rwanda", affirme Newbury. Personne aux Etas-Unis ne se serait jamais preoccupé par ce petit pays, s'il n'y a pas eu ce génocide de 1994 et c'est parceque l'administration Clinton a eu honte de son inaptitude durant ce génocide qu'il a, selon Newbury, apporté un soutien aveugle au régime de Kigali, sans s'assurer de ce qu'il en faisait. La nouvelle administration de Bush, assure Newbury, n'est pas embarrassé par les fautes de Clinton à ce sujet: "Colin Powell pose des questions plus liées à la realpolitik qu'a des conditions éventuelles du retrait des troupes étrangères du Congo". Autrement dit, Colin Powell veut les troupes étrangères au Congo dehors, sans conditions. Ces fameuses conditions ne semblent à l'avis de la nouvelle administration qu'un prétexte pour rester abusivement au Congo. Résumant l'ensemble du régime de Kigali en une phrase, Edouard Bustin, a politologue à la Boston University, dit: "Le Rwanda n'est pas aujourd'hui un pays qui a une armée, mais une armée qui a un pays ... Kagame est appelé président, mais il est un dictateur qui a pris le pouvoir par la force". (Ibidem) Le Boston Globe n'est qu'indicatif du ton acerbe d'un ensemble d'articles de presse parus dans la presse anglo-saxonne ces derniers mois. Ainsi donc, messieurs G. Sebaganwa, M. Rukema, P. Sebintu, M. Ruhimbika ont raison de vite se démarquer d'un tel régime qui ne sert pas du tout les intérêts de tous les rwandais, ni même pas ceux de la majorité des tutsis du Rwanda. Encore moins servira-t-il les intérêts des tutsis du Congo! Ce régime n'a fait que les instrumentaliser et transformer en objet de leur politique aveugle, revancharde et ne consuisant nulle part qu'à sa propre destruction à terme. Car on ne maintient pas impunément des dizaines de millions de gens sous le boiseau d'une occupation oppressante sans que une explosion ne voit le jour. Le deuxième élément positif est que MM. G. Sebaganwa, M. Rukema, P. Sebintu et M. Ruhimbika peržoivent le Rwanda pour la première fois comme ayant agressé le Congo. A la lumière des faits relatés par de plus en plus de gens sérieux, y compris le roi Kigeli, et la presse internationale, les massacres commis au Congo sous le prétexte d'assurer la sécurité interne du Rwanda ne peuvent pas être couverts. Et MM. G. Sebaganwa, M. Rukema, P. Sebintu, M. Ruhimbika font preuve d'honnêteté en les reconnaissant implicitement sous le label "agresseurs". Le troisième élément positif est la reconnaissance par MM. G. Sebaganwa, M. Rukema, P. Sebintu et M. Ruhimbika de l'importance du Dialogue Inter Congolais qu'ils proposent de faire précéder par une "Conférence Provinciale" dont l'idée en soi n'est pas mauvaise. II. Les points négatifs Malgré le caractère positif des éléments cités plus hauts, il y a des intérrogations majeures que le discours des auteurs de la lettre ouverte n'a pu vraiment nous cacher. Nous les épinglons progressivement en réponse aux constats (1)-(4) faits par les auteurs eux-mêmes. II.1. Proposition de la tenue d'une Conférence Provinciale Nous l'avons dit plus haut: c'est une bonne idée. Les gens doivent apprendre à reparler et à regler leurs problèmes par le discours et non par les armes. Cependant, les multiples problèmes du Kivu ne se réduisent pas à la question de la nationalité de certains des groups ethniques de la région. Tout l'Est du Congo est confronté a bien plus sérieux encore: l'exportation des problèmes internes du Rwanda et du Burundi au Congo. La question de la nationalité n'est pas une question régionale, mais de compétence nationale à regler dans le cadre d'un Etat de droit en fonction des dispositions prévues par la loi. Et, bien s¹r, un Etat de droit ne peut se permettre de mettre en place des lois iniques. Il est donc important que tous aient confiance en des méchanismes de la l'application de la loi. Débattre "des causes exactes et des circonstances historiques ayant nourri ces querelles jusqu'à aboutir à la confrontation violente et sans merci entre nos populations" est juste et doit se faire. Mais les conclusions d'un tel débat ne peut devenir une loi que via un parlement national ayant seul l'autorité en la matière. II.2. Médiation internationale au Kivu Nous nous posons la question de savoir pourquoi un problème provincial du Congo ne devrait pas trouver sa solution dans la médiation de congolais eux-même. C'est déjà assez humiliant pour la patrie qu'un Dialogue Inter Congolais doivent se faire sous l'égide d'étrangers, alors que la CNS avait été l'oeuvre des seuls congolais. Ce serait encore plus intolérable que des questions propres à nos provinces doivent être réglées aussi par des étrangers. Il existe des personnalités suffisament crédibles au Congo pour calmer la situation au Kivu. II.3. Opposition des élites unies du Kivu à l'agression Lorsque la guerre de 1996-97 a connu son épilogue en mai 1997 par l'autoproclamation de Laurent Kabila comme président de la république, l'apport du Rwanda a été grande, aidé en cela par la communauté à la quelle appartiennent les auteurs. Les tutsis du Congo ont activement fait partie de l'armée rwandaise dans la campagne qui a porté Kabila au pouvoir. Beaucoup ont même participé au contre-génocide contre les hutu rwandais ayant fui au Congo et dont plus de 200.000 sont portés disparus. Tout ceci à tel enseigne que les congolais ont eu à assimiler les tutsis du Congo au régime de Kigali et à les considerer comme pas du tout loyals vis-à-vis du Congo dont ils sont pourtant citoyens. Certains parmi les quatre auteurs de la lettre ouverte ont d'ailleurs eu à adopter activement l'attitude du régime de Kigali. Il apparait peu crédible de leur part d'affirmer abruptement que ce régime de Kigali avec le quel ils ont pactisé si longtemps est devenu "agresseur" du Congo. Pourquoi ce changement brusque maintenant? Alors que, lorsque des personnages importants du Congo comme M. Etienne Tshisekedi ou A. Gizenga ont affirmé dès le début du régime Kabila que le Congo était dirigé par des étrangers, ils ont tout simplement été bannis (Tshisekedi) ou battus (Gizenga). En outre, les élites du Kivu ont été décapitées, souvent avec la complicité active des gens de la communauté tutsi du Congo. Il est donc archi-important de faire un tri préalable entre ceux qui ont des crimes à se reprocher et ceux, certainement majoritaires, qui n'ont rien à se reprocher. Le premier pas à faire est de présenter des excuses publiques pour le râle que les premiers ont joué. Aucune excuse n'est cependant perceptible dans la letre ouverte de MM. G. Sebaganwa, M. Rukema, P. Sebintu et M. Ruhimbika. Bien plus, les Forces Républicaines Fédéralistes nous semblent constituées selon un modèle de parti ethnique répondant aux normes d'un fédéralisme d'ethnies. Ce n'est pas un modèle que nous préconisons. Une preuve de meilleure volonté serait sans conteste d'adhérer aux grands partis populaires et nationaux qui existent et qui sont le creuset de l'unité nationale. II.4. Dialogue Inter Congolais Le Dialogue Inter Congolais sera gonflé de l'apport de tous les congolais. Les grandes problématiques propres aux provinces ont largement été traités dans les vastes consultations regionales des sociétés civiles qui ont précédé la Conférence Nationale Souveraine. Le Dialogue Inter Congolais n'est pas une CNS bis. Il n'y est pas non plus question de négocier le départ des forces armées étrangères présentes au Congo. Ces forces armées ont déjà eu plusieurs injonctions de l'ONU et de l'OUA pour quitter le Congo. Elles doivent donc impérativement quitter le Congo. Le Dialogue Inter Congolais sera avant tout consacré aux questions institutionnelles congolaises. Si forces armées est question, cela ne pourra être que des forces armées du Congo, toutes les autres armées devant quitter le Congo au moment du déploiement des forces de l'ONU. III. En guise de conclusions: les non-dits du discours des auteurs Pour un début de dialogue définitivement constructif, les non-dits suivants devraient être élucidés: la lettre ouverte parle de "négocier" le retrait des forces armées étrangères. Alors que le sentiment national prédominant au Congo en est au départ sans délai de toutes ces armées étrangères, parler de leur retrait apparait à peine comme un marteau suspendu sur la tête de nos concityens selon le motto: donnez nous tous les droits que réclamons, sinon nos amis étrangers ne partirons pas ! Il est à noter que c'est un language similaire qui est utilisé par le régime de Kinshasa. Nulle part nous n'avons vu ne fut-ce que un début d'excuses par rapport aux immondes crimes de toutes natures commis au Congo. Les auteurs sont encouragés à accélérer un tel processus de condamnation. Cela les démarquera des criminels qui, nécessairement, seront poursuivis par la justice dans un Etat de droit. Il a certes la reconnaissante implicite d'avoir été instrumentalisé. Cette reconnaissante implicite devrait s'accompagner d'un vrai processus interne aux Banyamulenge et aux Tutsi du Nord-Kivu visant à déterminer qui, en leur sein, a profité de cette instrumentalisation. Le concept d'un fédéralisme d'ethnies n'est pas viable est à rejetter catégoriquement. Les congolais ne devraient pas s'associer en partis sur base ethniques. Cela nous rappele ce que furent la plupart des "partis" ayant formé l'AFDL de triste mémoire: ils n'eurent de parti que le nom et ne furent souvent que des rassemblement sur base ethniques. La rédaction |