Qui sont les Banyamulenge?

1. QUI SONT LES BANYAMULENGE?

Selon diverses sources historiques, les premiers groupes ancestraux des Banyamulenge sont arrivés ils y a 200 ans dans la région qui deviendra plus tard le Congo Belge, puis le Zaïre, et finalement la République démocratique du Congo. Le groupe s'est constitué à partir de quatre groupes d'origines: un premier groupe originaire du Rwanda, un deuxième en provenance du Burundi, un troisième de Tanzanie et un quatrième groupe composé d'esclaves issus de tribus locales (Bashi, Bafulero et Batetela) qui ont progressivement été incorporés comme membres à part entière.

Les Banyamulenge habitent la province du Sud-Kivu et, en 1996, à la veille de la première congolaise, leur nombre était estimé à 400'000 personnes.

Comme on peut le déduire de leurs origines diverses, les Banyamulenge ne sont pas tout d'origine tutsie, même si une majorité affirme avoir des ancêtres dans ce groupe éthnique. De plus, culturellement parlant, la division entre les concepts éthniques de "Tutsi" et de "Hutu" n'a pas pour eux la même signification qu'au Rwanda et au Burundi. En fait, les Banyamulenge centrent leur identité sur les concepts identitaires de "Banyamulenge" et de "Congolais" plutôt que sur celui de "Tutsi".

2. QUELS ONT ÉTE LEURS PRINCIPAUX PROBLÈMES EN RDC?

a. Sous le régime de Mobutu

Au cours des deux dernières décennies du régime Mobutu, les Banyamulenge ont été la cible de discrimination éthnique systématique : en dépit du fait qu'ils étaient reconnus historiquement comme une des tribus natives du Congo, c'est-à-dire comme l'un des groupes établis sur le territoire congolais avant 1885, ils se sont vu nier leurs droits civiques, comme celui d'être élu au Parlement, d'être ministre, etc., et au début de 1996 on leur a enlevé leur citoyenneté congolaise, et le régime de Mobutu a décidé de les expulser à l'étranger, spécifiquement au Burindi et au Rwanda. C'est ce qui explique qu'en août 1996, un groupe de jeunes Banyamulenge (dont certains reçurent une formation militaire au Rwanda, alors que les autres désertèrent d'unités militaires uaïroises) prirent les armes pour combattre le régime Mobutu. Deux mois plus tard, ils furent rejoints par Laurent-Désiré Kabila qui, en mai 1997, devint le nouveau président du Congo, après la défaite des troupes de Mobutu.

Au cours de cette guerre, les Banyamulenge ont été appuyés par les troupes rwandaises pour deux raisons principales : certains Banyamulenge avaient combattu avec le Front Patriotique Rwandais, contribuant à sa prise du pouvoir à Kigali en 1994, et au lendemain de sa victoire, l'armée du FPR (l'APR) se trouva engagée dans une poursuite des combats contre les reste de l'armée rwandaise génocidaire (FAR) et les milices Interahamwe, qui lançaient des attaques à partir du territoire congolais, depuis les provinces du nord et du sud Kivu.

b. Sous le régime Kabila

On devrait garder à l'esprit que malgré de sérieuses réserves exprimées par les Banyamulenge, Laurent-Désiré Kabila fut placé à la tête de la rébellion par l'Ouganda et le Rwanda. Les Banyamulenge n'avaient en effet pas oublié les crimes commis contre eux au cours de la rébellion muléliste des années 1960.

Une fois arrivé au pouvoir en mai 1997, Kabila a nommé des officiers rwandais à des postes de commandement stratégique au sein des forces armées congolaises (FAC) : le colonel rwandais James Kabarebe devint le chef d'état-major des FAC (poste qu'il occupa de mai 1997 à juillet 1998). Les officiers Banyamulenge qui avaient pourtant joué un rôle clef au cours de la campagne militaire des différents pays de la région contre le régime Mobutu, ne seront pas promus, à cause de l'agenda secret du Rwanda au Congo. A l'époque, à cause des positions stratégiques qu'ils étiennent dans l'appareil militaire congolais, les Rwandais estiment qu'il leur sera possible de manipuler le régime de Kabila pendant longtemps. Le gouvernement rwandais est pleinement conscient que les Banyamulenge, tant les militaires au sein de l'armée congolaise que les dirigeants politique, sont opposés à cette politique de manipulation secrète. Cette opposition au contrôle de fait exercé par le Rwanda sur une partie de l'appareil d'Etat congolais, explique pourquoi aucun officier Banyamulenge ne fut promu au sein des FAC entre le mois de mai 1997 et le mois d'août 1998.

En juillet 1998, alors que Laurent-Désira Kabila tente de prendre le contrôle total de l'appareil d'Etat, on assiste à une détérioration rapide des rapports entre le régime congolais et les Rwandais. Les troupes rwandaises se voient finalement signifier un ordre d'expulsion du Congo. Lorsque la deuxième guerre éclatera finalement, en août 1998, la principale cible de l'armée congolaise sur l'ensemble du territoire national fut (et demeure à ce jour) les Banyamulenge (civils et militaires confondus). Kabila et certains de ses ministres iront jusqu'à inciter le peuple congolais à "tuer tous les Tutsis" (Banyamulenge et autres Tutsis). Subséquemment, des milliers de personnes assimilées à un groupe éthnique sur la seule base de leur faciès furent tuées ou emprisonnées. Dans certains cas, cela mènera au meurtre de personnes n'ayant rien à voir avec les Banyamulenge ou les Tutsis, comme des Peuls d'Afrique de l'ouest dont le seul tort fut d'avoir été présents à Kinshasa au moment de ces événements.

3. LE DIFFÉREND ENTRE LES BANYAMULENGE ET LES RWANDAIS

SUR LA QUESTION CONGOLAISE

Le premier différend entre les Banyamulenge et les Rwandais remonte à décembre 1996, lorsque l'APR, sous prétexte de "raisons de sécurité", planifie le déplacement de l'ensemble de la population Banyamulenge du Sud Kivu vers le Rwanda. Pour certains Banyamulenge, ceci équivaut à une "déportation" forcée, à laquelle s'opposeront de nombreux officiers Banyamulenge qui seront arrêtés et emprisonnés au Rwanda pendant neuf mois sans autre forme de procès. Parallèlement, les dirigeants Banyamulenge qui s'opposeront à ce plan seront purgés des structures politiques de l'Alliance des forces démocratiques pour la libération (ADFL, coalition au pouvoir à Kinshasa). ceux qui sont proches de Kabila seront les seuls qui accepteront d'être manipulés par les Rwandais.

A l'heure actuelle, c'est également le cas de ceux qui détiennent des postes au sein du RCD-Goma (coalition d'opposition à Kabila), présentement dirigé par le Dr. Emile Ilunga.

En fait, lorsqu'éclate la deuxième guerre congolaise en août 1998, des dirigeants Banyamulenge, auxquels se joignent d'autres Congolais, décident de la création d'un parti politique complètement indépendant du Rwanda et de tout autre pays étranger. Les FRF (Forces républicaines et fédéralistes) furent malheureusement rapidement sabotées par les services de renseignement rwandais, et ses dirigeants forcés de s'exiler en Europe, mais le parti jouit encore d'appuis très importants parmi la population, particulièrement dans la province du Sud-Kivu où les rebelles du RCD-Goma, eux, n'ont aucun appui populaire. Tous les efforts en faveur d'une réconciliation par les dirigeants des différents groupes éthniques du Sud-Kivu et d'autres régions dans l'est de la RDC, ont été systématiquement sabotés par les militaires rwandais basés dans cette région du Congo, ainsi que par le régime de Kabila.

En résumé, les Banyamulenge sont opposés à la politique du gouvernement rwandais, qui consiste en RDC à dominer le peuple congolais et à piller ses ressources naturelles (minières et forestières). Cette position s'applique aussi aux autres pays, comme l'Angola, l'Ouganda et le Zimbabwe qui ont, dans les faits, la même politique que le Rwanda. Les Banyamulenge et tous les autres groupes éthniques de la RDC qui ont directement fait les frais de la réalité de la politique étrangère de ces pays dans les territoires occupés de l'est et du nord du pays, ou dans les régions minières du Katanga et du Kasaï -où les alliés de Kinshasa ont obtenu un accès sans limite aux diamants et aux autres ressources minières- sont arrivés à la même conclusion : toutes les puissances étrangères doivent se retirer de la RDC et un processus de réconciliation nationale doit être mis en oeuvre.

La communauté internationale doit venir en appui à ce processus et un Tribunal pénal international doit être créé avec un mandat couvrant la période allant de 1993 au temps présent, afin que ceux qui sont coupables de crimes contre l'humanité puissent être traduits devant la justice pour mettre fin au cycle de la violence et pour permettre aux collectivités et aux individus d'Afrique centrale de mettre cette période de souffrance et de mort derrière eux.

Merci a quelques associations rwandaises et helvéto-rwandaises en Suisse:

ABISHEMA Femmes d'origine rwandaise
Case postale 1145 CH-1201
Genève

ASR Association Suisse-Rwanda
Case postale 99 CH.1211
Genève 13

CORS Communauté Rwandaise de Suisse
Case postale 170 CH-1211
Genève 28

IBUKA Mémoire et Justice
Case postale 2246 CH-1211
Genève 2

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